Cinquième épisode du balado Capable, entreprendre sans limites, avec Camille Chai. [Narrateur] Vous écoutez « Capable, entreprendre sans limites. » Un balado offert par le gouvernement du Québec. [Kim Auclair] - Aujourd'hui, le thème de l'épisode est la représentation de l'handicap dans les médias. J'ai avec moi Camille Chai, qui est conférencière et animatrice. Allô Camille? [Camille Chai] - Bonjour Kim. [Kim] - Camille, est-ce que tu pourrais te présenter un petit peu plus ton handicap, mais aussi qu'est-ce que tu fais dans la vie de tous les jours? [Camille] - Oui. En fait, je suis une fille de communication, alors, de se rencontrer dans un contexte comme celui-là, dans un studio avec des micros, c'est quelque chose que j'aime beaucoup. Je suis conférencière, animatrice télé, animatrice radio. J'ai aussi fait une formation pour être thérapeute en relations d'aide. Donc, petit côté psychologie que je rajoute à mon bagage qui est très important aussi. Et je suis fière d'en parler, mais il y a quelques années, moi, j'ai été athlète en escrime, en fauteuil roulant, et j'ai gagné les championnats panaméricains en escrime. Donc, petite fierté là aussi. [Kim] - C'est ça qui te poussait un peu à devenir une conférencière, puis, à vouloir partager ton parcours? [Camille] - Ça s'est rajouté à ma conférence parce que je donnais déjà des conférences avant même de devenir une athlète, parce que même avant d'être devenue une athlète, j'avais déjà beaucoup à raconter. Donc, je partageais déjà mon histoire et mon parcours dans des écoles primaires, secondaires et pour des entreprises aussi. [Kim] - Tu as toujours été une personne à ton compte, pas mal autonome depuis longtemps dans le monde des communications? [Camille] - Oui. Et c'est un sujet qui prend de plus en plus d'importance pour moi, le fait de dire que oui, je suis à mon compte, être travailleur autonome, quand on est handicapé, c'est important, je trouve de… En fait, je suis contente d'être là avec toi, Kim, parce que je veux en parler. Les gens ne sont pas assez conscients de c'est quoi la réalité d'une personne autonome handicapée. [Kim] - C'est vrai. [Camille] - Voilà. [Kim] - En plus, aujourd'hui, la thématique, c'est la représentation de l'handicap dans les médias. Donc, non seulement tu as une situation d'handicap, mais tu t'affiches aussi publiquement, tu es à l'aise de te montrer publiquement. Puis, ce n'est pas tout le monde qui a ce… Pas ce courage-là, ce n'est pas vraiment le courage, mais le « gut » de se présenter à des émissions, de postuler pour créer ses propres émissions de télévision aussi ou ses propres émissions de radio, que tu fais exactement. [Camille] - Oui, je trouve que c'est important. C'est vrai que moi, spontanément, c'est un monde qui m'attire. Pour moi, le contact avec les autres a toujours été important et a souvent été très riche. Même depuis que je suis toute petite, je me suis vite rendue compte du regard des autres envers moi, étant handicapée, étant différente. Puis, j'ai toujours été bien dans ma peau. Je suis née sans bras ni jambe gauche. J'ai toujours très bien accepté mon handicap. Souvent, les gens me demandent : « Mais tu as dû avoir des moments difficiles, même dans ta jeunesse surtout? » Non, pas en lien avec mon handicap dans ma jeunesse, aucunement. Donc, oui, pour moi, c'est du plaisir, en fait, même de… Plaisir, puis, c'est juste naturel, mais de me montrer, je veux… Je le vois, en fait, déjà dans la vie de tous les jours, quand je croise des gens, ils viennent me voir et les gens me posent des questions et les gens viennent souvent se confier à moi, me raconter leur parcours de vie ou leur défi. Et les gens, beaucoup, me disent: « Ah, merci, ça m'a fait du bien. » Puis, ils disent: « Je vais arrêter de me plaindre. » Moi, je veux amener les gens à être bien dans leur peau, qu'ils acceptent leur différence. On est tous différents, mais quand on choisit de l'accepter, notre différence, moi, je trouve que souvent, c'est notre différence qui va nous rendre beaux. [Kim] - Oui, puis, parlant de différence, justement, est-ce que tu pourrais décrire un petit peu plus la tienne? [Camille] - Oui. Alors, je suis née sans bras ni jambe gauche. Je suis la première enfant, donc, j'ai un frère et une sœur qui sont plus jeunes que moi. Ils ont tous leurs morceaux. [Kim] - Oh, ok! [Camille] - Les gens vont souvent dire: « Oh, ils sont normaux, eux. » On peut dire qu'ils sont normaux et moi, anormale. Ça, on peut en rigoler aussi. Mais c'est ça. Puis, mes parents ne savaient pas que j'allais naître handicapée comme ça. Quand ma mère était enceinte, ils ont pris une seule échographie et l'échographie a seulement révélé le côté droit, donc, là où il y a le bras et la jambe comme tout le monde. Donc, c'est comme ça que je suis née. Donc, j'ai souvent, toute mon enfance, rapidement, j'ai appris à utiliser et porter des prothèses, donc, prothèse de bras, prothèse de jambe. Aujourd'hui, je ne porte plus de prothèse de bras depuis plusieurs années maintenant. C'est un autre volet de ma vie, mais j'ai grandi… En fait, j'ai passé tout le début de ma vie de jeune adulte au Cambodge, dans le pays de mes origines, en Asie. Et c'est là que j'ai arrêté de porter ma prothèse de bras. Mais toute ma vie, ça fait partie de moi, ça fait partie de mon rituel d'habillement de porter mes prothèses. [Kim] - Tu as toujours été dans le monde des communications. [Camille] - Oui. [Kim] - Tu as eu des projets de médias. C'est le fun de te voir, de te demander : « Aujourd'hui, on en est où avec ça, avec la représentation des handicaps dans les médias? » Toi qui as vu ça évoluer depuis quelques années. [Camille] - Oui. C'est vrai que ça a évolué. Si on repense à il y a quelques années seulement ou même si on se dit, par exemple, 10 ans, ça a complètement changé. Je trouve qu'il y a une belle ouverture d'esprit. [Kim] - C'est vrai. [Camille] - Oui, voilà, on a avancé. Je pense que c'est une question de… Comment on peut dire ça? Oui, c'est une ouverture d'esprit, c'est une façon de voir les choses. Je pense qu'on a avancé, mais j'ai envie de dire quand même qu'on n'a pas fini le travail. [Kim] - C'est vrai. [Camille] - Si tu me demandes où on en est aujourd'hui, c'est beaucoup mieux. Moi-même, avec mes projets personnels, je trouve ça incroyable. En fait, tous mes rêves sont en train de se réaliser tranquillement. [Kim] - Parce qu'il y a une plus grande ouverture. [Camille] - Exact! Exactement, il y a encore des préjugés, mais il y en a peut-être moins, du fait que les gens sont plus ouverts et plus curieux. Il y a une volonté d'apprendre à nous connaître. Ils sont curieux plus de savoir à quoi ressemble notre quotidien. Donc, ce qu'on fait en ce moment, je sais qu'on est en train de contribuer aussi à cette représentation des personnes handicapées dans les médias. Je veux continuer à donner ma participation. [Kim] - Ça ressemblerait à quoi tes défis avant et ceux que tu as aujourd'hui? [Camille] - Défis très simples. Ça, c'est une chose de base. Pourquoi je suis travailleur autonome? J'allais dire parce que je n'ai pas vraiment le choix. Oui, on a toujours le choix, mais j'ai essayé de travailler pour des organismes ou des entreprises, peu importe, pendant… J'ai essayé le cinq jours semaine, je n'ai jamais réussi. Donc, premier défi, premier obstacle pour moi, c'est la notion de l'énergie. De pouvoir suivre le même rythme que les autres personnes en général, c'est une chose qui est très difficile pour moi. Donc, le fait d'être travailleur autonome, c'est génial parce que je peux aller à mon rythme. Ce n'est pas du temps plein. Temps plein, ce n'est pas pour moi. Le temps partiel, c'est beaucoup mieux, c'est plus adapté. Ça me permet de mieux respirer, ça me permet de prendre mon temps. Puis, les gens ne sont pas nécessairement conscients, mais d'aller travailler, la petite routine que tout le monde a le matin, sortir de chez eux, se réveiller, se préparer, se faire à manger, s'habiller, tout ça, dans mon cas, tout ça, c'est fait à une main, une main. C'est ça qui change pour moi aujourd'hui, même mon discours, c'est que pour moi, c'est normal, mais quand j'arrive dans le monde… Je vais réutiliser le même mot, normal, des gens qui ont un peu le même rythme ou la même capacité de passer à travers une journée de neuf à cinq, cinq jours sur sept, là, je me rends compte que non, ce n'est pas fait pour moi, ce rythme-là. Donc, aujourd'hui, mes défis, c'est encore d'apprendre à m'écouter, à me découvrir, découvrir mes limites. [Kim] - De nommer aussi tes limites, je suppose, tu parles beaucoup de… Moi, j'ai lu beaucoup aussi à ton sujet, à quel point tu acceptais ton corps, tu acceptes ta différence, mais tu es capable toujours de dire tes limites, d'imposer, d'exprimer ta façon de travailler aux gens, de vendre cette façon-là? [Camille] - Mais ça, c'est un défi encore. [Kim] - Ah, oui? [Camille] - Je dirais que ce n'est pas acquis à 100 %, parce que d'expliquer, par exemple, à un employeur, ou même étant travailleur autonome, juste devoir expliquer quel est mon handicap aux personnes, il faut prendre le temps de le faire. [Kim] - Ça ne se limite pas juste à qu'est-ce qu'on voit? [Camille] - Non, mais pour ça, il faut prendre le temps, par exemple avec l'employeur ou mes collègues, de leur expliquer dans toutes les petites scènes du quotidien. Par exemple, quand j'arrive, le stationnement, juste le déplacement, c'est une chose en soi. Si je dois me stationner, si on doit me laisser à une adresse, si je prends un taxi, est-ce que j'ai des choses à traîner avec moi? Est-ce que j'ai des cahiers? Est-ce que je dois amener des vêtements pour me changer? Peu importe, selon le travail que je vais faire. Est-ce qu'il y a des escaliers? Est-ce qu'il y a des ascenseurs? Manger, si je dois faire mon propre repas, ça me demande beaucoup d'énergie et beaucoup plus de temps de tout faire ça à une main. Est-ce que dans mon contrat, on parle des médias, donc, souvent, il y a des caméras, tout ça, me maquiller, me faire les cheveux. Aujourd'hui, mes cheveux, c'est ma belle-fille de 11 ans qui me les a frisés, la veille, donc, hier soir. Donc, tu vois, tout ça, ça a l'air banal, mais ça doit être préparé et je dois prendre le temps qu'il faut pour faire ça. Puis, il y a des petites difficultés aussi. Quand je disais le terme d'énergie, c'est important pour moi de prendre des pauses, de pouvoir être assise, mais si je prenais vraiment tout le temps de décrire mes difficultés à mon employeur ou mes collègues, ce serait long, mais il faudrait que je puisse prendre ce temps-là. [Kim] - Ça demande la confiance de l'employeur de vouloir progresser avec toi, de tes clients en fait. [Camille] - Ça, c'est bien dit. Ça, c'est très bien dit. Puis, moi, ce qui me… Ce qui fait peur, c'est un petit peu exagéré de dire comme ça, mais c'est que je n'ai pas envie de me victimiser. [Kim] - Non, c'est vrai. [Camille] - C'est ça, je n'ai pas envie de dire: « Attends, viens t'asseoir, je veux te raconter. » Pour moi, c'est difficile de faire ça, ça, ça, ça… » C'est vrai, c'est ma réalité, mais à quel point je vais vouloir aller étaler ça sur la table? Donc, tu vois, ça reste un… [Kim] - As-tu l'impression qu'on te, pas te victimise encore, là, mais je veux dire qu'on, pas qu'on te prenne en pitié, mais qu'on… As-tu l'impression, des fois, qu'on te voit au-delà de tes compétences? [Camille] - Oui, exact. Merci, c'est en plein ça. Il y a un autre de mes défis, c'est que, comme tu l'as dit, j'ai toujours été bien dans ma peau, donc j'ai toujours été très fonceuse, très souriante. Parce que pour moi, c'est important d'être comme ça, pour moi-même. C'est ça qui me fait du bien, mais des fois, j'en paie le prix. [Kim] - C'est vrai? [Camille] - Bien oui, parce que tu l'as dit, les gens prennent pour acquis que je n'ai jamais de problèmes, que je suis très forte. Oui, je le suis, mais comme tout le monde, on a tous une force. [Kim] - Mais l'énergie en soi, la gestion de l'énergie, c'est déjà quelque chose. [Camille] - C'est vraiment quelque chose. [Kim] - Ce n'est pas tout le monde, parce que tu fonctionnes bien, parce que tu fonctionnes bien dans la société, mais ce n'est pas tout le monde qui est conscient de ça, aussi. [Camille] - Absolument pas. Donc, c'est à moi de le dire, mais il faut que, un, je prenne le temps, puis comme tu l'as dit, il faut que j'aie une ouverture, aussi, de l'autre côté. Donc non, pour moi, ça reste vraiment un défi. [Kim] - Est-ce que tu as fait appel à des organismes, des associations, des programmes particuliers qui t'ont permis d'appuyer ou de combler certains défis que tu avais? [Camille] - Pas vraiment. [Kim] - Pas vraiment? Tu n'es pas allée cogner aux portes? [Camille] - Non, je n'ai pas fait ça. Peut-être parce que c'est tellement plein de petits contrats ponctuels, donc ce sont toujours des nouvelles personnes, c'est toujours dans un contexte qui est différent, donc j'apprends sur le coup, puis après, je ne prends pas le temps, nécessairement, de tout analyser ou de me dire : « Oh, telle chose, j'aurais pu aller demander », comme tu le dis, de l'aide à tel ou tel organisme, mais ça s'en vient. Je prends ta question comme un aide-mémoire, un rafraichissement de me dire : « Oui, il faudrait que j'aille utiliser ça. » Je ne le fais pas assez. [Kim] - As-tu déjà eu l'impression de manquer des opportunités ou de rater des opportunités parce que tu t'es présentée en situation de handicap? Peut-être dans un monde plus normal, parce que là, actuellement, tu es à AMI-télé. [Camille] - Oui, entre autres. [Kim] - Une station de radio, AMI-télé, qui connait déjà les défis, mais es-tu déjà allée postuler ailleurs, en dehors? [Camille] - Pas tant. Je t'avoue, je suis quand même beaucoup restée dans le milieu des personnes handicapées. [Kim] - Ah oui? [Camille] - Oui. Parce que… [Kim] - Pourquoi? [Camille] - Bien, je ne sais pas. Aller postuler ailleurs, je ne l'ai jamais vraiment fait parce que postuler, c'était de me dire d'aller travailler pour une entreprise. Pour moi, déjà, c'était trop gros. [Kim] - OK. [Camille] - Par rapport à ce qu'on vient de dire, tu sais, le rythme. [Kim] - Bien par rapport à les avoir comme clients? [Camille] - Ah, les avoir comme clients? Si j'ai perdu, moi, des.. [Kim] - De la communauté en dehors de la communauté handicap, d'aller vers les gens, plus, non? [Camille] - Pas nécessairement, parce que bon, moi, mon domaine, c'est beaucoup la conférence, aussi, donc les gens viennent vers moi pour entendre mon histoire, donc quelque part, je n'ai pas tant ce problème-là. J'ai un peu un parcours qui est atypique, je t'avoue aussi. [Kim] - Quand on travaille dans les médias, quand même, il faut s'assurer d'avoir tout le temps des contrats, comment tu arrives à trouver ces opportunités-là ou elles viennent vers toi, mais quand c'est fini, qu'est-ce qui se passe? [Camille] - Bien, c'est ça, il y a des moments où je suis très occupée, d'autres qui vont être beaucoup plus calmes. Donc, c'est ça aussi les enjeux d'être travailleur autonome. Il y a des moments où je n'ai rien devant moi. Mais pour moi, j'ai toujours vécu comme ça et je dois dire une chose qui fait partie de cette réalité-là: Pourquoi je peux vivre comme ça? Pendant longtemps évidemment, j'ai eu l'aide de mes parents, il faut quand même le dire. Et aujourd'hui, je suis mariée. Le fait d'être avec mon conjoint, ça me permet d'avoir une stabilité et une qualité de vie que, par exemple, si j'avais été seule… [Kim] - Bien oui. [Camille] … Parce que c'est de ça qu'on parle, on parle du travail, mais ce n'est pas facile. J'ose parler au nom des autres personnes handicapées parce que je sais que beaucoup de personnes peuvent se reconnaître. Il y a évidemment des exceptions, mais c'est… [Kim] - L'entourage doit être important, énormément, on en parlait… [Camille] - L'entourage est important, oui, mais parce que c'est un enjeu de gagner notre vie. J'aurais peut-être fait autre chose si j'avais eu mes deux bras et mes deux jambes parce que j'aurais eu une autre capacité. J'aurais eu plus d'énergie. Donc voilà, c'est ma réalité à moi. [Kim] - Puis, récemment, tu as obtenu un super beau rôle à l'émission avec AMI-télé, pour l'émission « Ça me regarde ». [Camille] - Oui. [Kim] - Tu es devenue, vraiment, l'animatrice principale. [Camille] - Oui. [Kim] - Qu'est-ce que ça évoque pour toi, cette opportunité-là en or? [Camille] - Oui, c'est ça, c'est une opportunité en or. Je suis contente parce que c'est une émission qui met de l'avant les personnes handicapées, mais justement, on touche un petit peu à toutes les sphères de notre vie en tant que personne handicapée. Il y a plein de sujets, les gens viennent nous parler de leur vie personnelle, de leur projet, de leur défi, de leur travail. Donc, c'est une émission qui est très complète, mais qui est vraiment axée sur l'humain. Et, c'est ce que j'aime beaucoup parce que ce sont des rencontres incroyables. Une de mes phrases, que je vais répéter toute ma vie certainement c'est, j'aime dire aux gens, on l'a dit un peu tout à l'heure, mais « faites briller votre différence », parce que c'est elle qui vous rend unique. [Kim] - Ça ouvre des portes. [Camille] - Voilà. Donc, je suis contente d'être l'animatrice qui, si je peux aider certaines personnes à briller, à être vues, à être entendues. Il y en a plusieurs pour lesquelles, c'est la première fois qu'elles viennent en entrevue à la télévision. C'est merveilleux. [Kim] - Mais ça, aussi, tu le faisais, tu l'as toujours fait aussi avec ton autre émission de radio. Est-ce que c'est toujours actif? [Camille] - Pas pour l'instant, mais les émissions sont encore toujours disponibles. [Kim] - C'est un peu… de rencontrer beaucoup de personnes. [Camille] - Oui. [Kim] - Et dans les dernières années, comment tu dirais que leur perception, à ces gens-là, le fait d'être dans les médias, d'être plus visible, qu'est-ce que ça leur rapporte? [Camille] - Je sais que ça leur fait du bien. Je pourrais même dire que ça leur donne de l'espoir, parce que le but, c'est de… [Kim] - Le goût d'inspirer, on a l'impression d'avoir un impact positif. [Camille] - Exactement. Puis, c'est comme si chacun, on sert notre cause, selon le type de handicap, ou même, on peut mettre tous les handicaps ensemble. [Kim] - Oui. [Camille] - Parce qu'on a chacun nos différences, mais on se comprend énormément sur beaucoup de points, même si on n'a pas le même handicap. Donc oui, ça leur fait du bien, même au niveau de la confiance en soi, puis de l'estime, ça leur fait du bien. [Kim] - Le mot « handicap » pour toi, ça veut dire quoi? [Camille] - Je trouve que c'est une belle question parce que je sais qu'il y a beaucoup de préjugés en lien avec le mot « handicap ». De base, moi, je me dirais, j'imagine, je me dis que dans la tête des gens, le mot « handicap », ce n'est pas attirant. C'est poche, c'est plate, le mot « handicapé ». Qu'est-ce qu'elles font les personnes handicapées? Tu l'as dit tout à l'heure, tu as nommé la pitié. Souvent, ça génère de la pitié, le mot « handicap ». Mais, il faut le voir. Puis, le mot « handicap », je trouve que les gens l'imaginent un peu gris. Moi, je veux que les gens le voient aussi. Il peut être coloré, le mot « handicap », parce que le mot « handicap » est collé à un être humain. On vit avec notre handicap. Donc, on est une personne à part entière. On a des envies, comme tout le monde. On a des passions, on a des projets. Pour moi, le mot « handicap », ça peut être beau, mais on va se dire les vraies choses aussi. Un handicap, c'est vrai que ça reste quelque chose qui nous donne des défis au quotidien, des obstacles, des difficultés. Pour moi, c'est de plus en plus important de parler de cette sphère-là, du côté difficile. Je l'ai dit, j'aime sourire, j'aime montrer que je suis capable, mais là, je veux parler des choses, de tout. Donc, des choses plus difficiles. L'enjeu de l'énergie, on en a parlé tout à l'heure. Les douleurs, vivre avec un inconfort. Dans mon cas, c'est un bras et une jambe, donc, il y a de l'irritation, il y a beaucoup de douleurs. Il y a des choses qui se manifestent pour moi dans les dernières années, des douleurs que je ne ressentais pas avant. Je te dis honnêtement, ça me fait peur. [Kim] - Peur de perdre tout ce que tu as, peur de perdre toutes tes opportunités, de devoir t'arrêter. Je comprends. [Camille] - Puis, tu vois, j'aime que tu dises s'arrêter. Malgré mon handicap, j'ai toujours foncé, j'ai toujours voulu toucher à tout, faire plein de choses. Mais là, c'est ça, mon handicap des fois, me dit : « Camille », de toute façon, c'est mon corps qui me parle. Je n'ai pas le choix de m'arrêter parce que c'est mon corps qui se bloque. Un matin, je me suis réveillée, je n'étais plus capable de me relever de mon lit, juste de me lever dans mon lit. Et ça, ça m'a fait peur. [Kim] - Je comprends. [Camille] - Voilà, c'est un processus, qu'il faut faire. [Kim] - Puis les médias, ça procure une certaine adrénaline, quand on est dans une entrevue, quand on a une opportunité médiatique. On a toujours le goût d'en faire plus. C'est quoi? Est-ce que tu dirais que l'opportunité que tu as en ce moment avec AMI-Télé, c'est comme un gros jackpot qui va t'ouvrir encore plus de portes? [Camille] - Bien, je pense que oui. C'est vrai qu'on a toujours envie d'en faire plus. Il y a l'adrénaline, c'est motivant. Moi, je pense que oui, parce que la clé, c'est la rencontre avec les gens. Donc là, j'ai tellement cette chance d'en rencontrer, que je suis sûre que oui, ça pourra qu'aller dans ce sens-là. Puis, on parle depuis tout à l'heure de l'émission « Ça me regarde », que j'anime pour AMI-Télé. Mais, j'ai un autre magnifique projet que j'ai adoré faire aussi. J'ai été comédienne, donc pour la première fois, comédienne. Voilà, dans l'émission qui s'appelle « Vestiaire », qui va être diffusée en premier, donc par AMI-Télé et ensuite par Radio-Canada sur « Tou.tv ». Puis, c'est une fiction qui est humoristique et qui met en vedette des personnes handicapées. Donc là, il y a de l'humour là-dedans, on rit les uns des autres. [Kim] - Tu as l'impression qu'on donne plus d'opportunités médiatiques. [Camille] - Complètement. [Kim] - Il y a vraiment plein de portes qui s'ouvrent en ce moment. [Camille] - C'est ça, c'est exactement ça. [Kim] - Puis quand on parle de représentation dans les médias, c'est autant aussi s'afficher, afficher publiquement notre handicap. On en voit de plus en plus sur les réseaux sociaux, qui s'exposent sur Facebook, sur Twitter. Dirais-tu que tu vois ça, toi aussi? [Camille] - Oui, je le vois complètement. [Kim] - Twitter… En fait, ce n'est pas Twitter, mais plus TikTok. [Camille] - Oui. Mais oui, on en voit énormément. Justement, ça permet à des personnes qui restaient peut-être dans l'ombre, et là, hop, je me dis: « C'est très accessible. » Oui. Puis, ils ont juste à prendre leur téléphone, à se filmer, à publier. Ils n'ont plus à attendre qu'on vienne vers eux et qu'on les filme. Ce sont eux-mêmes qui peuvent se mettre de l'avant et je le vois qu'il y en a beaucoup qui le font donc tant mieux. [Kim] - On arrive déjà vers la fin de l'émission, Camille. Qu'est-ce qui me passionne pour toi… Enfin, qu'est-ce qui ce qui est intéressant pour moi de savoir. C'est qu'est-ce qu'on devrait donner comme conseils aux personnes en situation de handicap, justement, qui voudraient avoir plus d'opportunités médiatiques? Ce serait quoi les conseils que tu leur donnerais pour percer dans cet univers-là? [Camille] - Je vais me fier à ma propre expérience. Ce serait de prendre le temps de voir justement, quelles sont leurs limites, jusqu'où ils veulent aller dans le monde médiatique, puis la communication. Je pense que c'est ce qu'il y a de plus important, c'est de parler avec ceux qui vont les embaucher ou avec même leurs collègues. Je trouve que c'est vraiment important de… [Kim] - D'être transparent. [Camille] - D'être transparent puis de se dire que ces personnes-là travaillent avec nous et non contre nous, donc voilà, d'oser poser des questions aussi. [Kim] - Merci Camille. [Camille] - Merci à toi, ça m'a fait très plaisir. [Kim] - Merci d'avoir été avec nous. Pour le prochain épisode du « Balado Capable », on va parler de devenir artiste. [Narrateur] - Ce balado vous est offert par le gouvernement du Québec. [Votre gouvernement. Logo du gouvernement du Québec.]