Le 15 mars dernier, Daniel Jean, directeur général, Frances Champigny, présidente du conseil d’administration et Maxime Bélanger, directeur du Secrétariat général, communications et affaires juridiques, ont présenté en commission parlementaire le mémoire de l’Office sur le projet de loi no11. Ce projet de loi modifie la Loi concernant les soins de fin de vie et d’autres dispositions législatives. Il vise à donner suite à la majorité des recommandations de la Commission spéciale sur l’évolution de la Loi concernant les soins de fin de vie.
Rappelons que l’Office avait aussi participé à cette commission en 2021. Nous avions alors émis plusieurs recommandations visant essentiellement à trouver un juste équilibre entre le droit à l’autodétermination des personnes handicapées et la protection des personnes les plus vulnérables. Nos recommandations sur le projet de loi no 11 vont dans le même sens. Express-O vous présente un résumé de notre mémoire.
L’Office appuie globalement le projet de loi, car il porte sur des sujets qui ont fait l’objet d’un large débat et qui ont fait consensus. Nous appuyons ainsi deux aspects majeurs du projet de loi :
Nos principales préoccupations sont en rapport avec l’introduction dans la Loi du « handicap neuromoteur grave et incurable ».
Le projet de loi modifie la Loi pour inclure expressément les personnes ayant un « handicap neuromoteur grave et incurable ». Celles-ci pourront dorénavant demander l’aide médicale à mourir si elles répondent à toutes les autres conditions d’admissibilité de l’aide médicale à mourir (voir encadré).
Nous considérons que cette introduction du « handicap neuromoteur grave et incurable » soulève des enjeux importants qui méritent d’être examinés.
Premièrement, le terme « handicap neuromoteur grave et incurable » n’est pas défini par le projet de loi. Il n’existe aucun renvoi à ce terme dans le corpus législatif québécois. S’il n’est pas défini clairement dans la Loi, ce terme pourrait être sujet à des interprétations diverses.
Pour éviter toute divergence dans l’interprétation de ce terme, nous recommandons que l’on précise dans la Loi ce qu’on entend par « handicap neuromoteur grave et incurable » ou que l’on mandate la Commission sur les soins de fin de vie pour le faire. À notre avis, il faudrait tout au moins dresser la liste des diagnostics auxquels ce terme renvoie.
Les critères d’admissibilité de l’aide médicale à mourir
L’article 26 de la Loi énonce les six conditions essentielles auxquelles une personne doit satisfaire pour obtenir l’aide médicale à mourir :
La personne doit, de manière libre et éclairée, formuler pour elle-même la demande d’aide médicale à mourir au moyen du formulaire prescrit par le ministre. Ce formulaire doit être daté et signé par cette personne.
Le formulaire est signé en présence d’un professionnel de la santé ou des services sociaux qui le contresigne et qui, s’il n’est pas le médecin traitant de la personne, le remet à celui-ci.
Deuxièmement, le projet de loi ne vise qu’un segment de la population des personnes handicapées par l’élargissement de l’accès aux personnes ayant un « handicap neuromoteur ».
L’Office ne dispose d’aucune donnée démontrant que ce groupe présente des caractéristiques particulières qui les différencient des autres personnes handicapées ayant d’autres types d’incapacités.
Selon nous, cibler ainsi un groupe spécifique pourrait être discriminatoire et donner ouverture à des recours devant les tribunaux. D’où l’importance de mettre l’accent d’abord sur les autres critères d’admissibilité à l’aide médicale à mourir plutôt que sur le « handicap » ou la « maladie ».
Nous saluons cependant la volonté du législateur de prendre en compte la réalité des personnes handicapées dont la condition entraîne des souffrances constantes et insupportables qui ne peuvent être apaisées dans des conditions que ces personnes jugent tolérables.
Nous comprenons aussi qu’il veuille procéder avec prudence avant d’élargir davantage l’accès à l’aide médicale à mourir. Cette façon de faire permet de mieux gérer les risques et de protéger les personnes plus vulnérables.
Nous voyons que la question de l’accès à l’aide médicale à mourir est un sujet complexe et qui évolue. Il faut poursuive la réflexion et mener des travaux.
En ce sens, nous recommandons :
Cette dernière recommandation a d’ailleurs été retenue. La création d’un groupe d’experts a été annoncée par le gouvernement le 6 avril dernier. Ce groupe aura notamment comme mandats :
Les personnes qui formeront le groupe ont été sélectionnées selon leur expertise ou expérience significative. La composition a été choisie avec l’accord des ordres professionnels et des groupes invités en consultations particulières du projet de loi 11. L’Office siégera à ce comité.
Les travaux du groupe d’experts se dérouleront en parallèle des travaux parlementaires sur le projet de loi 11. Le groupe déposera son rapport final en mai 2023. Ce rapport permettra de soutenir la réflexion et la prise de décision des membres de la Commission.
Pour en savoir plus sur le mandat du groupe d’experts et sa composition, consultez le communiqué Aide médicale à mourir - La ministre Sonia Bélanger dévoile la composition du groupe d'experts qui se penchera sur la notion de handicap neuromoteur.
Pour en savoir plus et prendre connaissance de l’ensemble de nos commentaires, nous vous invitons à consulter notre mémoire.
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